Dormir dans un Manga café à Tokyo, où personne ne lit de mangas

Dormir dans un Manga café à Tokyo, où personne ne lit de mangas

4 :00 du mat – Je descends du bus à la gare routière de Shinjuku à Tokyo, fatigué comme jamais.

Quel jour est-on… ? Le 2 ? Le 3 ? Je ne sais plus. Ça fait des jours que je fais de l’auto-stop sous la pluie et la neige depuis Hokkaido. Je suis épuisé, mais je suis enfin arrivé à Tokyo !

Hier soir, n’ayant trouvé nulle part où dormir, j’ai attrapé un bus de nuit en promo. Le problème, c’est que je n’ai pas Internet avec moi, je n’ai donc prévu aucun endroit où dormir une fois à Tokyo. Mais je suis épuisé, je rêve de pouvoir m’allonger quelque part.

Soudain je réalise ; C’est l’occasion idéale pour enfin réaliser un de mes grands objectifs : Dormir dans un manga café !

Tokyo, la ville qui ne dort jamais

Poussé par la volonté d’accomplir ma destinée, je me mets à déambuler dans les rues à la recherche d’un manga café.

Autour de moi, de nombreux japonais, jeunes comme vieux, terminent leur nuit. Certains déambulent avec leurs potes ou leurs collègues encore bourrés, d’autres décuvent dans le caniveau, une mine terrible sur le visage.

Pourtant… Aujourd’hui c’est mardi. On est loin du weekend ! Est-ce que Tokyo est autant animée toutes les nuits !?

Le manga café GeraGera

Après avoir interrogé quelques jeunes à la démarche aléatoire, je trouve un manga café au 4ème étage d’un building : Le manga café GeraGera.

PS : Les japonais appellent ces endroits des « manga kissa ».

L’hôtesse m’accueille en parlant doucement pour ne pas élever le niveau sonore dans le café.

Elle me propose plusieurs options :

  • Un simple siège en face d’un ordinateur,
  • Une petite cabine avec un sol moelleux et un ordinateur (idéal pour dormir),
  • Des cabines plus spacieuses avec sol moelleux ou fauteuil confortable ou canapé et un ordinateur,
  • Des cabines pour plusieurs personnes avec plusieurs ordinateurs.

Je ne regarde pas trop le détail et demande une petite cabine avec sol moelleux.

Les prix étaient de :

  • 780 Yen (6,20€) pour 3 heures
  • 1120 Yen (8,90€) pour 6 heures
  • 1810 Yen (14,40€) pour 12 heures

Je choisi 6 heures ! La durée parfaite pour terminer ma nuit.

Ma carte de membre des manga cafés GeraGera

On me demande quelques yens en plus pour faire ma carte de membre (carte valable dans tous les mangas cafés GeraGera de Tokyo). Pas le choix… Je m’en tire pour 1500 yens (11,90€). Honnêtement c’est un peu cher vu que certains hôtels cheaps dans Tokyo proposent le même prix pour une nuit en dortoir. Enfin… Aucun hôtel ne m’accueillera à une heure aussi matinale.

Et puis, dans les hôtels, il n’y a pas de mangas ! pensais-je en regardant, fasciné, les rangées d’étagères remplies de manga.

Le manga café, où personne ne lit de mangas

Le manga café GeraGeraAvec la politesse propre au peuple japonais, l’hôtesse m’accompagne jusqu’à ma cabine. Sur le chemin, nous passons devant d’autres cabines en prenant soin de ne pas marcher sur les chaussures posées aux portes. Je remarque que la plupart des chaussures sont des chaussures pour femmes. Seules quelques cabines d’où s’élèvent des bruits de ronflement alcoolisés présentent des chaussures pour homme à leurs portes.

L’une d’entre elles laisse également dépasser une paire de jambe de la cabine.

Celui-là n’a même pas eu le courage de retirer ses chaussures et s’est effondré dans sa cabine en laissant ses jambes à l’extérieur.

Un peu plus loin, mon regard croise la fente entre le mur et la porte mal fermée d’une cabine. J’aperçois deux jeunes tourtereaux en plein « câlin ».

Seuls quelques ronflements se font entendre dans la grande salle. J’en viens à la conclusion que : Personne ne lit les mangas.

Ma cabine, mon cocon

Ma cabine au manga café GeraGera

Ma cabine avant installation

J’arrive à ma cabine : 4 planches de bois dont une coulissante, un sol moelleux en faux cuir, un petit pouf, une prise électrique, une lampe et un ordinateur en hauteur. Que demander de plus ?

L’hôtesse me quitte en s’inclinant à la japonaise. J’enlève mes chaussures et je m’installe. Quand je dis « je m’installe », je veux dire que je mets mon petit bordel, je branche mes chargeurs et j’attrape le Wifi.

Ma cabine au manga café GeraGera

Ma cabine après installation

J’en profite pour envoyer quelques requêtes d’hébergement sur Couchsurfing, puis je décide de faire honneur au manga café en lisant quelques mangas.

Je m’extirpe de ma cabine et commence à examiner les mangas. Il y en a tellement ! Je n’en reconnais aucun… Je dois pourtant en trouver un que je connais ou je ne vais rien comprendre (bien sûr que non je ne lis pas le japonais).

Soudain, après quelques minutes de recherche, j’en trouve un qui me rappelle quelque chose !

Daily Lives of High School Boys…

Mais oui bien sûr, j’avais regardé l’animé avec un pote. C’est des gags hilarants avec trois lycéens qui ne font que des conneries ! Rien que de m’en souvenir je rigole déjà.

Allez hop ! J’attrape 4 volumes !

Manga, soda et au lit !

Sur le retour, j’aperçois une fontaine à soda. Je pense que c’est en libre-service.

De toute façon, il n’y a personne pour surveiller. Hop ! Je me sers un peu de coca et je retourne entre mes quatre murs.

Dans la salle, la température est optimale et je m’emmitoufle à peine dans mon sac de couchage. Des couvertures sont en location à l’accueil, mais je n’en aurais pas besoin. En revanche, le pouf est un peu gros pour un oreiller. Je le remplace par mon fidèle oreiller gonflable de voyage.

Finalement, je m’endors au milieu du 2ème volume.

***

Je pense avoir été réveillé par l’occupant de la cabine d’à côté, qui s’est cogné contre le mur. Pas grave ! Il me reste 30 minutes avant la fin de mes 6 heures. Je checke mon téléphone et m’aperçois qu’un hôte Couchsurfing a accepté de m’héberger dès aujourd’hui. Il me donne même son adresse en disant qu’il peut m’accueillir dès maintenant.

J’ai de la chance !

J’ai juste le temps de feuilleter les deux autres volumes de Daily Lives of High School Boys, de remballer mes affaires et je passe en caisse 2 minutes avant la fin de mes 6 heures.

L’hôtesse (qui n’est plus la même), vérifie sur son ordinateur que je n’ai pas dépassé mon horaire, puis me remercie pour ma visite en me saluant. Je lui rends ses remerciements puis quitte le manga café.

Dehors, un soleil agressif et une marée humaine m’attendent…

Les réponses à mes questions

Après cette expérience, deux questions me trotteront dans la tête, et mon hôte (merci Takamine, tu as été un hôte génial !) m’apportera alors des réponses.

  • Tokyo est-elle autant animée chaque nuit ?

En fait, en cherchant le manga café, j’ai pénétré pile poil dans le quartier Kabukicho, quartier de la nuit et des clubs à Tokyo (qui se superpose étrangement bien avec le quartier des Love Hotels). Cet endroit est très animé tous les soirs.

  • Certaines personnes viennent-elles au manga café pour lire les mangas ?

Pas à 5 heure du mat ! Évidemment…

Si nous regardons l’histogramme de fréquentation du manga café GeraGera de Kabukicho, nous pouvons observer deux pics représentant les deux tendances de fréquentation du café.

Diagramme de fréquentation du manga café GeraGeraConclusion sur le manga café en général

Si nous revenions à l’important !

Le manga café est aussi cher qu’une auberge cheap, sans être aussi confortable. Il est parfaitement possible d’y dormir, mais on est facilement réveillé par les mouvements des autres personnes !

L’avantage du manga café, c’est qu’il accueille des clients 24h/24 sans réservation. Il est plutôt là pour dépanner :

  • Vous débarquez du bus de nuit à 5h du mat -> allez vous reposer au manga café,
  • Vous sortez de boite de nuit et les métros ne sont pas encore ouverts -> attendez dans un manga café,
  • Vous voulez faire une sieste au milieu de votre journée de tourisme -> faites une sieste dans un manga café,
  • Vous lisez le japonais -> allez lire des mangas au manga café,
  • Vous êtes un voyageur avide de découvertes -> passez au manga café parce que quand-même, c’est amusant !

Finalement, le manga café (ou manga kissa) est au Japon ce que les bains publics sont aux coréens (voir l’article sur ma nuit passée aux bains publics en Corée du Sud).

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